Chapitre 19

Lorsque nous arrivâmes chez nous, la maison était déserte. Pas un vampire. Bizarre. D’habitude, Bea était assise dans le canapé et regardait la télévision, Ashley jouait du piano, Wilma lisait, Henry était dans son bureau…enfin bref, tout le monde était occupé. Mais j’avais beau scanné les lieux mentalement, aucunes pensée ne me parvenait.

- Pourquoi n’y a-t-il personne ? dis-je à voix haute au cas quelqu’un daignerait se montrer.

- Je n’en sais rien, dit-il un peu sur la défensive, comme si quelque chose allait nous attaquer.

Il y a quelque chose ici, et ce n’est ni un humain, ni un vampire. C’est peut-être dangereux…

Mais avant qu’il n’ait terminé sa phrase, quelque chose surgit du plafond. Quelque chose d’inhumain. Personne n’avait jamais osé imaginer pareille chose. Bien qu’il ne resta que quelques secondes en notre compagnie, ma mémoire de vampire photographia sa peau véreuse, ses cheveux gras, ses yeux rouges, et…ses ongles aussi pointus que des griffes. Il partit avant même que j’ai eu le temps de dire beurk !!! Même les moments où Stephen et moi allions chasser dans la forêt pour nous rassasier n’étaient pas aussi dégoûtants.

En parlant de chasse, j’avais vraiment soif. Je le signalais en pensée à Stephen, qui ne pouvait décemment pas m’accompagner sans retrouver les siens. Je lui fis signe qu’il fallait absolument que je me nourrisse, et il me laissa aller seule dans la forêt de la propriété, ce qui n’était jamais arrivé.

Je traversai le terrain vide jusqu’à arriver en lisière de la forêt. On dirait que toutes les maisons dans lesquelles j’ai habité et dans lesquelles j’habiterai étaient bordées par une immense forêt.

Je traversais la nuée d’arbres qui m’entouraient lorsque mon ouïe de vampire entendit quelque chose venant de l’est. Je pris donc cette direction sans me poser de questions. Cela me faisait penser à ma première chasse.

Cela faisait une semaine que j’avais emménagé chez les Cowley. Nous avions tous un peu soif, nous étions donc partis dans la forêt. Tout m’était venu instinctivement. Je m’étais dirigée vers une proie dont les secondes étaient comptées. C’était un cerf. Pas très bon. Mais il m’avait rassasié. Mes vêtements étaient tâchés de sang, mais Stephen m’avait expliqué qu’avec le temps je m’y habituerais. Je ne m’étais toujours pas habituée. A chaque fois, je revenais avec une veste maculée de sang. Le T-shirt en dessous n’était pas mieux. Les baskets étaient fichues. Bref, je n’étais jamais revenue avec des vêtements propres.

Je continuais de marcher vers l’est, me demandant quel serait mon prochain repas. Mais une odeur venant du nord attira – et accapara – mon attention. Il me semblait que c’était du sang. Cette odeur d’épice douce et cet arôme si spécial, indescriptible. Mais venait s’y ajouter un arôme étrange, un mélange de sel et de rouille. Bizarre… Les branches des arbres me griffaient, et bien qu’elles ne me laissaient aucunes traces sur les bras, cela me faisait mal. Car j’avais beau avoir la peau d’un vampire, mon système nerveux était celui d’un humain. Mon corps ressentait donc la douleur. Pour Stephen, c’était l’inverse : les branches lui auraient laissé des marques sur les bras, il n’aurait par contre rien senti.

J’arrivais sur le lieu de mon prochain dîner. Enfin, j’allais pouvoir apaiser ma soif. Ma gorge était envahie d’un feu de forêt, si je puis me permettre la comparaison.

Mais ce qu’il y avait à l’endroit où j’imaginais déjà une proie juteuse, il y avait tout autre chose. Quelque chose de moins bien appétissant. Il y avait James. Oui, James, l’ancien chauffeur de mes anciens grands-parents. Mais il n’était pas tout seul. La deuxième personne était derrière lui, et bien que je pouvais deviner sa présence, je ne pouvais l’identifier. Ce n’est que lorsqu’elle parla que je puis l’identifier, et cette identité me fichait les jetons.

- Vous croyez vraiment ce que vous dites ?

Giulia. C’était Giulia. Je n’y croyais pas. Elle était avec l’ennemie. Déjà qu’elle n’était plus mon amie, mais là elle était carrément mon ennemie ! Mais ce n’est pas possible d’être aussi maléfique ! Je la détestais !

Mais je ne savais pas ce qu’elle faisait là, et je décidai de retenir ma respiration. Ma nature me permettait de retenir ma respiration plus longtemps. Mais pas indéfiniment. Mes cellules humaines finissaient par manquer d’oxygène, ce qui me forçait à reprendre une douce respiration. J’avais essayé une fois : j’avais tenu à peu près une demi-heure.

Cachée derrière un chêne assez large pour ne pas me faire voir, retenant ma respiration pour ne pas me faire entendre, j’essayais d’écouter leur conversation. J’écoutais aux portes, comme aurait dit Henry.

- Oui, je crois vraiment ce que je dis. Je crois vraiment que si tu ne te fais pas transformer, tu ne pourras pas élever William, et nous devrons te l’enlever, lui dit James.

On ? Il faisait donc parti d’un groupe. De combien de personnes ? Ou plutôt de combien de vampires ?

- Mais qui va me transformer ?

- Je le pourrais mais…

Oh quelle imbécile je suis !!! Qu’est-ce qu’il y a au pied d’un chêne ? Des glands ! Et qui est-ce qui vient de marcher sur un gland et qui, par la même occasion, s’est fait repérée ? Moi !

James et Giulia avait arrêté de causer. Ils savaient qu’il y avait quelqu’un. Je pouvais donc recommencer à respirer. Mais je ne pouvais pas me faire voir. Il fallait que je reste cachée. Ou que je m’enfuis à toute vitesse. La deuxième option était plus alléchante que la première, d’autant plus que James commençait à se rapprocher. D’après Henry, j’allais assez vite pour un vampire. Si je manquais de chance, James avait lui aussi un don pour courir plus vite que la moyenne, et je serais fichue, ou alors il était dans les normes, et allais moins vite que moi. Dans ce cas-là je serais sauvée. Mais il fallait absolument que j’ai de la chance.

Je sentis l’adrénaline envahir mes muscles et je m’élançais dans la forêt. J’entendais las pas de James derrière moi, mais ils s’estompaient. J’avais de la chance. Mais le côté humain de mes muscles reprit le dessus, et je fus bientôt obligée d’arrêter de courir. J’étais arrivée en lisière de la forêt. Ses pas s’approchèrent de moi. Avec les dernières forces qu’il me restait, je décidai de courir une dernière fois jusqu’à la maison. Je donnai un grand coup sur la porte, puis décidai de laisser la fatigue immense me submerger.

 

 



28/06/2010
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