Chapitre 11

          Je me réveillai en sursaut. Le plafond au-dessus de moi était flou. Je clignai des yeux. Maintenant, tout était parfaitement net. Au milieu de la chambre dans laquelle j’étais allongée trônait une petite table sur laquelle étaient disposées toutes sortes de nourriture que je n’aurais point imaginée. Je me tirai des couvertures blanches disposées autour de moi et me dirigeai vers cette petite table des merveilles. Puis, un litchi dans la bouche, je me dirigeai vers la fenêtre aux rideaux tirés. J’ouvrai ceux-ci et un spectacle aussi inattendu qu’effrayant me sauta aux yeux : j’étais revenue, ici, à Palm Springs, ma ville natale. J’étais née ici, j’avais vécue ici, et mes parents étaient morts ici.

          La ville était telle que dans mes souvenirs : de hauts gratte-ciels et le soleil sur le centre-ville. J’étais visiblement dans une maison, ou alors au rez-de-chaussée d’un immeuble. Je me dirigeai vers la porte de la chambre et ouvris la porte. En fait, la chambre était un appartement, et elle donnait sur une grande salle. Je devais être dans un refuge, ou quelque chose comme ça. Je me dirigeai vers le comptoir d’accueil.

« Excusez-moi, dis-je à la bénévole assise de l’autre côté du comptoir, qu’est-ce que je fais ici ?

- Mmm… - elle essayait visiblement de se rappeler qui j’étais – Ah oui, nos bénévoles, t’ont retrouvée évanouie sous un pont hier soir. Tu avais les bras lacérés et tes vêtements étaient déchirés. Puis-je avoir ton nom ? »

          J’hésitais. Puis, finalement, me décidai que je ne dirai rien. Ou presque.

« Je m’appelle Marianne Gathe.» répondis-je avec un léger pincement au cœur.

          Elle me tendit mes affaires – qu’elle avait soigneusement préparées pour moi : il y avait quelques vêtements et un peu de nourriture – puis je sortis en toute tranquillité. Mon sac-à-dos sur les épaules, je marchai le long du trottoir, en me demandant ce que j’allais faire et comment je m’étais retrouvée ici, à Palm Springs, mais surtout comment j’avais fais pour parcourir tous les Etats-Unis en seulement une seule nuit, ce qui était humainement impossible. Étais-je vraiment celle que je croyais ?

          Les barres énergétiques du centre ne me suffirent que durant huit cents mètres – j’en avais trois – et le premier commerce le long de mon trottoir était le bienvenu. Le commerce qui croisa le premier ma route fut un petit magasin vendant uniquement des fruits et légumes. Il s’appelait « Le petit vert ». Je rentrai dedans. C’est à ce moment là que je me mis à paniquer. J’avais oublié le plus important : Stephen. Et puis pourquoi étais-je ici ? Je m’écroulai de panique sur le sol du magasin lorsqu’il posa une main sur mon épaule gauche – je me rendis d’ailleurs compte que j’avais une griffure à cet endroit. Je me retournai vivement en ôtant sa main de mon épaule, me rendant compte que l’écartement des griffures de mon épaule correspondait à celui de ses doigts. Je regardai Stephen, avec des yeux partagés entre la frayeur, la colère, et la tristesse. Je sortis du magasin, les larmes aux yeux, avec un envie irrésistible de me retourner et de lui poser les mille-et-une questions qui me brûlaient les lèvres.

          Je quittai le magasin, et je sentis qu’il me suivait. Je marchai de plus en plus vite, regardant toutes les trente secondes derrière moi, et remarquant qu’il se rapprochait de plus en plus. Je courrai, et, me faufilant entre les gens qui me bloquaient le passage, j’arrivai dans un marché. Parfait. C’était tout ce qu’il me fallait. Je marchai, mine de rien, entre les acheteurs de jambons ou de légumes qui attendaient, et arrivai devant un stand de jeux. Je m’y arrêtai, donnai une pièce qui était dans mon pantalon – je me rendis alors compte que ce n’était pas mon pantalon, et qu’il avait déjà dut servir, vu que je n’avais mis aucune pièce dedans – et pris une des balles que me tendait la vendeuse. Je réussis à dégommer cinq boîtes sur six, lorsque je le vis se déplacer dans la foule avec une extrême simplicité. Il se dirigeait vers moi. Je rendis la balle que la vendeuse venait de me donner, et partis, entendant les braiements de la vendeuse essayant de me retenir. Je courus aussi vite que j’ai pu, regardant derrière moi. J’étais totalement paniquée. De grosses goutes de transpiration coulaient sur mon front, et je cherchai désespérément une cachette à l’abri des regards. Je sortis du marché, et me rendis compte qu’il était situé au bord d’un petit ruisseau. Je me dis qu’un pont le traversait sûrement. Je marchai le long du cours d’eau, en m’impatientant – parce que je ne trouvai aucun pont – et arrivai dans un parc. Celui-ci ressemblait fort à la forêt amazonienne. Je lus sur la pancarte : « défense de : cracher, jeter vos chewing-gum par terre, atteindre à la vie de la nature… » et toute une liste d’ordres aussi infantiles les uns que les autres. Je me précipitai dans le parc, en me disant qu’avec près de trois mille arbres de mon côté, je saurais peut-être échapper à mon chasseur.

          Je trouvai enfin un pont, mais je me suis vite dit qu’il valait mieux pour moi de ne pas être obligée de me cacher sous un pont, si je ne voulais pas retrouver ma chambre au centre. Je traversai donc ce dernier, me cognant le bout du pied contre les pavés du pont qui dépassaient du ciment. Arrivée de l’autre côté, je me mis à patauger dans une sorte de marais. Ce côté du parc n’était visiblement pas beaucoup visiter – les ronces envahissaient le chemin – et le chemin était une vraie piscine – il avait certainement plu pas plus tard qu’hier soir. Plus je m’enfonçais dans la forêt qui servait de parc, plus je me disais que ma sortie de celle-ci serait très, très périlleuse. Et Staumon, mes amis et mes grands-parents, ma petite vie tranquille, tout cela commençait vraiment à me manquer.



09/02/2010
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